Feuille Morte

Encore un automne et, encore une fois
En voyant les feuilles mortes, je pense à toi
Depuis le temps, le monde n’est pas resté tel quel
Alors j’en profite pour te donner des nouvelles

On parle toujours de ton humoriste préféré
Mais c’est parce que ses mots se font récupérer
Déformer, marteler par des usurpateurs véreux
Qui le tuent à nouveau, tant ils sont cancéreux

D’ailleurs, le cancer ne s’est pas calmé pour autant
Il a emporté le pianiste du plus grand groupe de tous les temps
Alors ils ont, certes, sans prendre beaucoup de risques
Fini par sortir et lui dédier un dernier disque

Le chanteur qui scandait que la société l’aurait pas
Eh bien, elle l’a eu ; je suis soulagé que t’aies pas vu ça
Sa musique se dégrade autant que son état
Il va finir victime des mêmes faiblesses que toi

Ca n’arrivera pas à ta progéniture, je te rassure
Si tu pouvais voir à quel point ta fille assure !
Le bulldozer aux yeux bleus, ton gâillou
Et d’ailleurs, quand c’est qu’il passe, le marchand de cailloux ?

Je sais pas si c’est moi ou tous les autres qui ont un grain
J’essaie d’y réfléchir en prenant une gorgée de vin
Comme tu l’aimerais, rouge avec une pointe de chagrin
Comment tu occupes ton temps, à celle du Devin ?

J’y suis passé l’été dernier, histoire de montrer ma gueule
J’imagine que t’as remarqué que j’étais pas venu tout seul…

Depuis que tu te terres dans ce repaire
Dans tous mes rêves, je te re-perds
Et avec toi, amer, tous mes repères
Je voulais faire de toi un heureux père !

Je veux faire comme toi en séduisant
Mais surtout pas en conduisant
Allez, j’arrête d’être médisant
Putain… ça fait seulement dix ans

Je t’aime, je pense à toi, je t’oublie pas, Papa
Passe le bonjour au tien et prends bien soin de mon chat.